François

En rentrant des champs de Rizolles  un paysan  croise sur le chemin qui mène à Auzon un homme très élégant qui le salue en disant :
– Eh bien, mon brave Mathieu, tu me reconnais pas ?

L’autre se frotte les yeux :
– Mais cré nom ! C’est le Françoué… Ben, dis donc, mon gars, t’as l’air d’un monsieur…
– S’il te plaît, ne me dis plus “Françoué”. Désormais on m’appelle François.

 Je suis parti comme tu le sais à Royat, et j’ai fait fortune, ce qui me permet d’avoir une vie de rêve. J’ai une maison magnifique. Le matin au réveil, je monte sur la terrasse. Puis je prends mon petit déjeuner, j’appelle mon agent de change pour donner mes instructions pour la Bourse, je prends mon bain, je vais me promener. A l’heure de l’apéritif, je monte sur la terrasse. Ensuite déjeuner, quelquefois petite sieste sur la terrasse, coup de téléphone à mon agent de change pour savoir comment était la Bourse. Le soir, apéritif sur la terrasse, ensuite dîner, et puis s’il fait chaud, avec un beau ciel étoilé, je reste longuement sur la terrasse avant d’aller dormir. Tu vois que j’ai une vie plutôt agréable…
– Ben ça oui !… fait le paysan.

A peine rentré chez lui, il dit à sa femme :
– Marie ! Tu devineras jamais qui je viens de rencontrer ? Le Françoué !
– Et qu’est-ce qu’il devient, ce feignant de Françoué ?
– Ce feignant, comme tu dis, c’est devenu quelqu’un. D’abord, c’est plus Françoué, c’est François. Et sa femme, c’est plus la Thérèse, c’est la Terrasse……

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